Cameroun-Yinda, le « Duc de Ngompem », s’est éteint.

Le décès de Louis Yinda, celui que tout le monde surnommait le « Duc de Ngompem », a suscité une profonde tristesse en particulier dans son département d’origine, la Sanaga maritime, où il était une figure politique de premier plan. Militant et hiérarque du RDPC, le parti au pouvoir, il a également marqué le paysage économique camerounais en tant que magnat de la société sucrière du Cameroun.

Né vers 1940 à Ngompen, Louis Yinda a suivi sa formation à l’école catholique de Pouma et au Collège Libermann de Douala, où il a obtenu son Baccalauréat. Sa quête de connaissances l’a conduit en France, où il a étudié la gestion à Aix-en-Provence, puis le droit et les sciences politiques à Paris. Cette solide formation lui a permis de débuter comme archiviste en France avant de revenir au Cameroun en 1969, où il a rapidement gravi les échelons en tant que cadre qualifié.

En 1972, il est nommé secrétaire général pour l’Afrique centrale par le Groupe industriel Pechiney, et ainsi commence une ascension fulgurante dans le Cameroun post-independance. Il a joué un rôle déterminant dans la création de la Sonel en tant que secrétaire général d’Électricité du Cameroun, contribuant à la fusion d’Enelcam et Powercam.

L’apogée de sa carrière a eu lieu à la Société Sucrière du Cameroun (Sosucam). En novembre 1975, il rejoint l’entreprise comme cadre commercial, et son ascension est rapide : il devient directeur général adjoint, puis directeur général. En 2000, il est nommé Président directeur général. Louis Yinda passera au total 36 ans à la direction de la  Sosucam. Son règne à la tête de Sosucam a pris fin en novembre 2018, lorsqu’un nouveau conseil d’administration l’a remplacé par Alexandre Vilgrain. Toutefois, même après son départ de Sosucam, Louis Yinda est resté administrateur du groupe Somdiaa et a continué d’être consulté pour son expertise du secteur agro-industriel en Afrique.

Pour partager sa riche expérience managériale avec les jeunes du contient, il fonde en 2014 l’Institut Universitaire Louis Yinda (IULY), une institution qui perpétuera son nom et ses valeurs, preuve indélébile de sa contribution au développement du capital humain des jeunes générations.

Au plan politique, Louis Yinda était un membre fondateur du RDPC et un membre de son comité central depuis 1985. Il a longtemps évolué dans l’ombre de Joseph Mboui, ancien patron du parti dans la Sanaga maritime. Son militantisme discret lui a permis de s’imposer au sein des plus hautes sphères du pouvoir. Il a souvent représenté le président Paul Biya lors de cérémonies officielles, un fait rare pour un directeur général d’entreprise privée. Après le décès de Joseph Mboui en 2017, il prendra les rênes de la délégation permanente du comité central pour le département de la Sanaga maritime. 

En dehors de ses activités professionnelles, Louis Yinda se distinguait par son goût prononcé pour les champagnes de grande marque. Sa passion pour la gastronomie et son aisance à manier la langue de Molière ajoutaient une touche de sophistication à sa personnalité. Il était reconnu pour son éloquence, captivant ses interlocuteurs par la richesse de son vocabulaire et son art de la conversation.

Louis Yinda laisse derrière lui un héritage complexe, entre succès économique, discrétion et tensions politiques. Son parcours illustre les subtilités d’une carrière où l’influence et les controverses se mêlent à la perfection. Alors que la Sanaga maritime pleure l’un de ses dignes fils, son héritage restera gravé dans les annales de la politique et de l’économie camerounaises.

UAMG-Joseph KIZERBO